
Sur les pas de Jacques de Panafieu, pionnier humaniste
Au fil de mes articles qui dévoilent divers aspects de mon intérêt pour la « relation », j’ai aujourd’hui à cœur de vous présenter un être d’exception : Jacques de Panafieu.
Ce qu’il a accompli dans le monde
Psychothérapeute de renom, maître d’intensifs, formateur de psychothérapeutes, de rebirth-thérapeutes, de clarificateurs, et de maîtres d’intensifs (séminaires « Qui suis-je »), superviseur, rédacteur d’ouvrages de référence dans les domaines précités… Pionnier du développement des thérapies humanistes, il introduira en France la Clarification et en sera la figure de proue jusqu’à son décès en 2001. Et tant d’autres choses…
LE DÉBUT DE MON histoire...
J’ai eu l’immense privilège de faire sa connaissance l’année qui a précédé son départ. Cette rencontre a bouleversé mes fondements et m’a marquée pour toujours.
Cela s’est passé lors du dernier repas d’un Séminaire Intensif alors qu’il m’a conviée à sa table (légère panique). J’étais très jeune et je pensais n’avoir rien à dire à quelqu’un d’une telle valeur et d'une telle expérience. J’avais une personnalité très discrète pour ne pas dire en retrait, fort intimidée face à des personnes « impressionnantes ».
Et pourtant… je n’ai jamais communiqué avec autant de facilité que ce jour-là : chacune de mes paroles révélaient un sens que je ne soupçonnais pas, une brillance même, alors qu’il me questionnait et m’écoutait. J’avais le sentiment d’être un joyau unique. Mais le plus surprenant était la paix, la simplicité, la bienveillance et l’ouverture que je ressentais dans sa présence. Tout ce qui en moi habituellement souffrait de doute et d'insécurité s’était évanoui. Je me sentais aimée, au cœur d’un espace immense. L'horizon s’ouvrait de toutes parts !
Je ne savais vraiment pas ce qui se passait…
Je l’ai compris plus tard. Mais ce que j’ai vécu ce jour-là s’est érigé comme un phare lumineux : je voulais retrouver ce sentiment d’être moi, libre de contrainte et de peur, lieu depuis lequel la vie semble une aventure hautement passionnante et vibrante du moment présent. Dans cette qualité de conscience, les couleurs sont intenses et vivantes, la joie, une eau étincelante, bondissante… et les autres sont des mystères que l’on est très excité de découvrir, comme de nouveaux mondes à aimer. Le séminaire qui s’achevait avait bien sûr créé l’ouverture en moi pour qu’émerge cette expérience. Mais ce contact offert par Jacques, d’une plénitude et d’une puissance que je ne connaissais pas, est ce qui lui a donné un sens : voilà comment je veux vivre.
Mon existence a pris un virage.
J'avais trouvé un cap. J’ai intimement compris qu’il me fallait me dépouiller, et que pour cela, la route serait longue, probablement ardue, mais que rien n’était plus précieux. 22 ans après : j’ai arpenté les chemins de mon en large et je me suis un peu rapprochée de ce noyau intact, libre, pur potentiel, surgi dans le contact avec cet autre individu qui savait écouter, voir, et aimer vraiment.
Les Séminaires Intensifs et la Clarification : mes fers de lance.
La Clarification à laquelle j’ai choisi de dédier une majeure part de mon temps et de mon énergie, dénoue, décortique, défait, dissout patiemment ce que le mental a inextricablement enchevêtré et compliqué. C’est du mental dont je devais me dépouiller, ce « dragon de papier » « dont le seul pouvoir est sa crédibilité » (Charles Berner) qui filtre et déforme ma perception de tout ce qui existe, de moi y-compris, et dirige mes décisions et mes choix.
Mais qu’est-ce que le mental ??
Avoir une connaissance éclairée de ce qu’est le mental est d’une importance capitale ; elle nous révèle son omniprésente dans notre existence, alors que nous pensons que « c’est juste la vie... »
Voilà comment le détaille avec justesse, réalisme et de façon imagée, Jacques de Panafieu :
« Il existe de multiples définitions du mental. Pour nous, ici, le mental n’est ni le cerveau, ni la conscience, ni l’intelligence. On pourrait le décrire sommairement dans un premier temps comme ce qui encombre l’esprit. Imaginez une corbeille “ attente ” sur votre bureau. Vous travaillez sur les feuilles du dessus, puis vous vous apercevez qu’il y en a beaucoup d’autres empilées en dessous. C’est trop pour le moment. Vous baissez les bras. Il vous arrive aussi de mettre des messages dans la corbeille “ départ ” mais le garçon de bureau ne passe jamais les ramasser ; personne ne les lira. Ces messages sont également conservés dans le mental. Le mental est saturé parce qu’il sert de réceptacle à tout ce qui n’a pas été vécu complètement, à ce qui n’a pas été intégré de notre passé. Tout ces éléments se superposent en couches successives, solidaires les unes des autres. Les premières peuvent être analysées en termes de contenu. Les plus profondes touchent à la forme et aux structures de base. On trouve d’abord les non-dits, les non-ressentis, les non-agis, les situations inachevées, les émotions refoulées, les traumatismes du passé.
Quelqu’un a vécu par exemple dans son enfance des situations si traumatisantes qu’il n’a pu les intégrer dans leur totalité. Une partie est restée en suspens dans son esprit. On découvre ensuite les sentiments de culpabilité et de honte, freins puissants au développement personnel, Plus profondément encore apparaissent les croyances, les attitudes et les comportements figés, les identifications erronées. Au cours de notre existence, et cela dès notre naissance, nous nous sommes identifiés en effet à des multitudes d’objets, d’idées, de qualités, de personnes, d’êtres, etc., qui n’avaient rien à voir avec notre vraie nature. Derrière ces identifications se profilent les attitudes de base par rapport à nous-mêmes, par rapport aux autres et par rapport à la vie, qui ont généré les structures fondamentales déterminant notre réalité, ce que certains appellent le caractère...
Comment se mettent en place ces structures de base ? Généralement dans notre petite enfance, parfois au moment de la naissance, lorsque nous sommes confrontés à des situations angoissantes, alors que nous manquons des informations et des compétences nécessaires pour les gérer “ objectivement ”... »
Cela peut sembler un peu affolant : mais alors, le mental, c’est tout ! Et comment s’en défaire ?… Et si l’on s’en défait, que reste-t-il ? Bonne question…
Si nous ne sommes pas notre mental, que sommes-nous alors ?
Pour beaucoup d’entre nous, l’évidence est que nous sommes ce que nous expérimentons : nos émotions, nos pensées, nos états… Nous y sommes tellement identifiés que le doute n’existe pas. Que pourrions-nous être d’autre ? …
MAIS avez-vous eu un jour la réalisation étrange que tout ce fatras que vous expérimentez n’est pas vous ? Vous en êtes-vous décollé quelques secondes et avez-vous perçu cette évidence, depuis un regard détaché, immobile, vaste… Ce regard, qui émane de l’individu conscient.
QU'EST-CE QUE L’individu conscient ? ce qu’en dit Jacques de Panafieu :
« Plus fondamentalement encore, la Clarification repose sur le concept d’individu. (…) Au sens premier, individu signifie “ insécable ” (indivisible). Il en découle que : “ Nous sommes (…) au niveau spirituel, la cause de nous-mêmes, c’est à dire des êtres libres, et, en ce sens, parfaits ”. »
Pour illustration, je reviens à ce repas de fin de séminaire : la personnalité en retrait qui orientait ma préférence vers un repas dans mon coin, tranquille, non exposée à ce que les autres me voient ignorante et peu digne d’intérêt, est une partie de mon mental. L’expansion soudaine, au contact de Jacques de Panafieu, est le surgissement de l’individu qui naturellement se déploie lorsqu’il cesse d'être contraint par le diktat du mental. Ces moments sont des instants de grâce ; dans un clin d’œil, nous entr’apercevons l’éternité. Parfois, l’impact est suffisamment puissant pour que nous dédiions le reste de notre vie à avancer vers cette lumière, notre libération.
Et la Clarification dans tout ça ?
« La reconnaissance de la perfection de l’individu ne masque pas le fait que les relations entre ces individus parfaits, sont, elles, très loin d’être parfaites. La tâche du clarificateur sera d’aider ces individus parfaits à retrouver leur capacité à gérer les relations de façon plus congruente avec leur véritable nature, et pour ce faire, de communiquer de façon directe et non à travers des comportements que d’autres écoles qualifieraient de névrotiques. Voilà quelques uns des fondements métaphysiques de la Clarification, qui garantissent de la part du clarificateur le respect absolu de la personne et des objectifs des clarifiants. »
La visée de la Clarification est de dissoudre le mental, ce qui aura pour effet de faire surgir l'Individu qui a été enfoui sous toutes ces couches. Son nom d'origine est « Mind Clearing », et le sens de « to clear » est : nettoyer, déblayer, débroussailler, dégager, ce que manque de faire la traduction française. Le mental se dissout au travers d’une compréhension complète entre le clarificateur et le clarifiant.
Communication directe, communication indirecte ?
En lisant la suite, vous comprendrez mieux le rôle de la communication.
Jacques de Panafieu décrit la genèse du mental avec clarté. Lorsque nous renonçons à nous présenter aux autres tel que nous sommes, après le constat que cette communication directe n’aboutit pas, nous entrons dans des stratégies indirectes : nous nous mettons à communiquer au travers de comportements qui, nous le croyons, feront comprendre aux les autres ce que nous voulons leur dire. Malheureusement - et heureusement, aucune de ces communications n’aboutit jamais.
Au départ LE PETIT ENFANT…
« Au départ le petit enfant est dans une communication directe avec son entourage. Il n’est pas “ en représentation ”. Il se présente dans sa vérité, tel qu’il est. Il est rare par contre que les adultes entendent cette communication directe du fait de leurs peurs et des barrières qu’ils ont édifiées pour se protéger. L’enfant se rend compte que sa communication directe n’a pas été comprise. Il va chercher dans les modèles familiaux le mode de communication qu’il pense le plus susceptible de faire passer son message. Ce mode indirect va progressivement infléchir sa façon d’être jusqu’à devenir sa structure caractérielle de base. »
Différentes stratégies de communication
« Les champions, les présidents de la République, entre autres, sont persuadés qu’ils ne seront aimés que s’ils réussissent ou s’ils sont parfaits. D’autres s’attendent à être reconnus pour eux-mêmes, sans rien avoir à faire ou à prouver. (…) Certains choisissent un mode de communication indirect en opposition complète avec leur vrai message : ils se rendront odieux pour être sûrs que l’amour qu’on leur porte est vraiment fiable. Si je me montre insupportable, boudeur, colérique, exigeant, larmoyant, mal rasé, mal coiffé, non fardé, dépenaillé, et qu’on m’aime toujours, alors il y a une chance que cet amour soit sincère. »
L’origine du mental
« L’origine du mental réside en ceci que la personne a du mal à communiquer aux autres qui elle est, et à recevoir des autres qui ils sont. La raison pour laquelle elle a adopté ces attitudes au départ est qu’elle avait du mal à faire en sorte que les autres la comprennent et à comprendre les autres tels qu’ils sont véritablement. Nous commençons à entrevoir que le mental est généré chaque fois qu’une chose n’est pas communiquée entre individus, chaque fois que nous nous fermons à un autre ou que nous tentons d’exercer une pression sur lui. Chaque fois que nous avons perçu ou utilisé les autres en tant qu’instruments au lieu de les reconnaître en tant que personnes ou libres individus. »
Notre vrai message
« Toutes les communications entre humains peuvent se ramener aux deux messages fondamentaux : “ Aime-moi ” et, plus essentiel encore : “ Je t’aime ”. »
Il est extrêmement émouvant de réaliser cela. Ahurissant aussi, non ?! ... Tout, absolument tout ce que nous faisons dans la vie est une tentative de faire passer aux autres ce message. Force est de prendre la mesure du caractère éminemment indirect de nos communications... Et de la nécessité urgente d’apprendre à être en vraie relation – et non plus au travers de substituts. Ce que l’on y gagne ? L’amour qui circule entre soi et les autres. Le retour à nous et à notre vérité. L’accomplissement dans nos vies… et tant d’autres bénédictions…
La boucle est bouclée pour aujourd’hui, retour à Charles Berner, créateur de la Clarification :
« La seule solution dans la vie réside dans une amélioration des relations. »
Jacques de Panafieu nous a quittés le 17 mars 2001, depuis 21 ans presque jour pour jour.
J’ai écrit cet article en hommage à cet homme que je n’oublierai jamais. Le vrai message que je lui adresse est que je l’aime encore, et pour toujours. Je le remercie sans fin pour le rôle qu’il a eu dans ma vie.
Je voulais vous faire connaître, au travers de ces nombreuses citations, sa parole limpide, directe, sage. j'espère vous avoir peut-être donné envie de lire son petit livre* si accessible et simple, qui offre des clés de compréhension essentielles au sujet de la relation, que l’on veuille se lancer dans l’aventure de la Clarification, ou non.
Pour finir, une invitation à la contemplation, un texte de Krishnamurti que Jacques de Panafieu aimait : de la vraie compréhension entre individus.
« Que signifie partager la compréhension ? Comment faire pour partager cette chose-là ? Pour partager la compréhension que nous avons (d’une chose) et non le constat purement verbal ni la description que l'on en fait, ni les explications que l'on en donne ? Et que signifie cette compréhension ? Vous me dites quelque chose qui est sérieux, vital, pertinent, important, et j'écoute avec une attention complète, parce que, pour moi, l'enjeu est vital. Et pour que mon écoute soit à la mesure de cet enjeu vital, il faut que mon esprit soit calme, silencieux, n'est-ce pas ? Si je bavarde, si j'ai le regard ailleurs, si je compare ce que vous dites à ce que je sais, mon esprit n'est pas tranquille et silencieux. Ce n'est que lorsque mon esprit est calme, immobile, silencieux, entièrement à l'écoute, qu'il y a compréhension de la vérité d'une chose. Cela nous le partageons ensemble ; autrement nous ne pouvons pas partager. Nous ne pouvons pas partager les paroles, nous ne pouvons partager que la vérité d'une chose. Vous et moi ne pouvons voir la vérité d'une chose que lorsque notre esprit s'engage tout entier dans cet examen. »
*« La Clarification, méthode de libération » Jacques de Panafieu Collection Essentialis
Merci pour votre lecture. N'hésitez pas à laisser un commentaire.
Cathy PASCAL - Séances de Clarification à distance - Entretien initial gratuit. Contactez-moi : 06 29 93 15 31 - Visitez mon site : https://cathy-pascal.com
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